Le match décisif pour le titre entre les cannois menés par Inarkiev et Sasikiran et nos clichois emmenés par Laurent Fressinet Dieter Nisipeanu aura tenu toutes ses promesses. En voici le déroulement: photo © Cannes - Echecs
Heure 1:
LECONTE - SKRIPCHENKO:
Maria Leconte, peu en confiance après deux défaites décevantes durant la phase, va respecter à la lettre les consignes fixées par son équipe. Faire nulle vite avec les blancs. Dans une position sans risques et dans un match où les victoires vont être rares, la décision est toujours contestable. Mais vu l'état de forme différent entre les deux joueuses, on peut le comprendre aussi. Un premier match nul qui ne choque personne.(0-0)
Heure 2:
KAZHGALEYEV - EDOUARD:
Romain joue un gambit-dame accepté contre le buteur des matchs importants pour Cannes, le sympathique Murtas. Très vite, on sent que Murtas maîtrise mieux son sujet et que conformément aux prévisions, la partie s'annonce rude pour Clichy...
APICELLA - CORNETTE:
La tuile. Manu donne un pion après une grosse gaffe, avec les blancs. Le jeune cannois encaisse sans hésiter mais proposera immédiatement aux blancs de transposer en finale de fous de couleurs opposées. Un choix peu adéquat joué sans doute dans l'euphorie de l'avantage pris. Cela dit, Manu s'apprête à jouer 6h sans la moindre chance de gain...
NAIDITSCH - NATAF et TKACHIEV-PELLETIER:
Dans ces deux parties, les joueurs dépensent énormément de temps, tous les quatre étant plongés dans des considérations théoriques d'ouverture. De douloureux zeitnots en perspective!
Heure 3:
JAKOVENKO - FONTAINE:
Notre buteur russe a pris un pion, mais Robert Fontaine a un jeu actif. Le point visé par notre équipe se complique. A ce moemnt du match, nous ne sommes plus favoris.
NISIPEANU - INARKIEV:
Là encore, les chances baissent, car Dieter a raté des plans intéressants. Le jeune russe de Cannes a presque fait le plus dur pour égaliser.
KAZHGALEYEV - EDOUARD:
Murtas concrétise le mauvais placement des pièces noires. La position est sans aucun espoir pour nous et Romain continue une finale désespérée au cas où...
Heure 4:
NISIPEANU - INARKIEV:
La partie est plate et Dieter doit se résoudre à la nulle (0-0). Notre premier échiquier sort de l'aire de jeu et confie au clan clichois: "nous sommes complètement foutus".
NAIDITSCH - NATAF:
Un malheur n'arrivant jamais seul, Arkadij a littéralement donné la partie à Igor en essayant de la gagner pour remonter la mauvaise pente du match... Il ne pourra plus compter que sur le zeitnot qui s'annonce pour Igor. Mais avec une position tellement horrible, on ne se fait guère d'illusions.
KAZHGALEYEV - EDOUARD:
Ouverture du score pour Cannes (1-0). Murtas encore une fois très impressionant. Il aura la médaille du 3ème échiquier avec 8,5/10.
Les zeitnots arrivent, et la gestion de ce moment est cruciale.
JAKOVENKO - FONTAINE:
La position se décante chez Dimitri qui nous refait espérer! Robert craque peu à peu sous la pression du temps et lâche petit à petit la finale
TKACHIEV - PELLETIER:
Yannick a très bien défendu et se retrouve PEUT-ETRE dans une position un soupçon supèrieure. Cette performance remonte clairement le moral de l'équipe qui recommence à y croire. Vlad tranpose en finale avec un pion de moins mais sa tour est active. Il propose une répétition de coups, et nous devons nous décider. En comptant le point de Dimitri (loin d'être fait, mais dans le cas contraire, ce n'est même plus la peine de calculer!) on serait à 1-1 avec trois positions restantes. Manu a montré depuis longtemps qu'il ne perdrait pas, la position de Laurent contre Sasikiran a une bonne tête, et l'incertitude vient d'Arkadij qui va, ou pas, arnaquer la position. Yannick n'a que très peu de temps pour se décider et , élément décisif, l'attitude d'Arkadij nous convainc de prendre ce gros risque. Plus pour des raisons de superstition (Arkadij a sauvé l'équipe deux fois pour gagner la Coupe en 2006 et le titre en 2007)que pour de réelles motivations échiquéennes, tant la position est compliquée, quoique sans doute toujours gagnante pour Igor.
Nulle conclue entre les deux joueurs. toujours 1-0.
Yannick a peur que cette décision nous fasse perde le match. Nous en sommes tous conscients, mais cette décision aura au moins le mérite d'empêcher Vlad de forcer si Igor a un accident de position...
NAIDITSCH - NATAF:
En crise de temps, Igor commence à enchaîner les imprécisions et avant le 40ème coup, prend une décision lourde de conséquence: il sacrifie une pièce!! Si Igor ne risque pas de perdre car il a toujours le perpétuel, il ne pourra plus reculer. La question est: est-ce nulle forcée ou gain immédiat.
Heure 5:
La lutte continue encore sur quatre échiquiers et on passe le stade des 5 heures de jeu, ce qui est tout de même assez exceptionnel!
Igor réfléchit toujours, ce qui nous laisse penser qu'il n'a plus d'idées concrètes.
Heure 6:
JAKOVENKO - FONTAINE:
Dimitri égalise enfin! (1-1) On l'attendait, mais que ce point aura été dur à avoir tant Robert a bien résisté. On recommence à y croire, voire même un peu plus car Igor ne semble vraiment pas savoir quoi faire...
SASIKIRAN - FRESSINET:
La position est devenue inconfortable pour Laurent, et nous revoilà en danger! Sans pour autant être perdant, on sait que Sasi va travailler jusqu'au bout pour forcer le gain pour Cannes. Encore des souffrances en perspectives.
Après 5h30 de jeu:
L'incroyable se produit!! Sasi oublie qu'il a répété trois fois la même position!! Les moments étaient tellement espacés qu'il a complètement oublié ce détail du règlement qui le force a faire nulle! (1-1)
Quelques minutes plus tard, Igor admet ce que nous avions tous compris, il ne peut faire plus que le perpétuel. Nulle signée (1-1).
Enfin, Matthieu Cornette, qui continuait depuis lontemps pour la forme, signe aussi la nulle avec Manu, qui se sera battu comme un diable pour limiter la casse quis emblait inévitable après 10 coups!
SCORE FINAL: 1-1
Dans un climat de tension puis de joie parfaitement indescriptible, Clichy remporte le titre 2008.
Clairement, nous n'avions plus notre sort entre les mains dans ce match, sur un jeu parfait de nos adversaires. Mais au moment de conclure, il faut reconnaître à nos joueurs un acharnement et un instinct de survie remarquable. Comment gâcher une telle saison (10 matchs gagnés sur 10 possibles, 44 victoires individuelles pour seulement 4 défaites) sur un match pouvait-il s'envisager? Il ne l'ont pas envisagé et ils ont tenu.
Un grand coup de chapeau à nos adversaires cannois tout de même qui, il faut le reconnaître, nous ont totalement dépassé dans l'approche du match et dans son déroulement dans les premières heures. Notre match nul est d'autant plus méritoire!
Bravo et merci à Almira Skripchenko, Dimitri Jakovenko, Dieter Nisipeanu, Laurent Fressinet, Arkadij Naiditsch, Yannick Pelletier, Manuel Apicella, Romain Edouard mais aussi Pavel Eljanov et Pavel Tregubov, absents lors de cette phase (mais 8,5/10 à eux deux) mais si précieux dans la saison pour ce titre 2008!
Merci aussi aux auteurs des nombreux messages de félicitations qui ne cessent d'arriver depuis hier, 1er Juin.
A l'année prochaine, avec une saison 2009 qui s'annonce tout aussi palpitante!